Introduction
L’amour était « au commencement »…
L’amour est considéré comme un attribut divin dans le Coran, et Dieu y est qualifié d’« infiniment aimable et aimant (wadûd) ». Dans la Thora, Yahvé parle à Moïse en ces termes : « Ô fils d’Adam! Par le droit que je t’ai accordé, je t’aime, et par le droit que j’ai sur toi, aime moi. » Le Shemma Israël, la prière journalière des juifs, proclame : « Tu aimeras le Seigneur notre Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme et de toutes tes forces. Ces paroles que je te prescris aujourd’hui resteront dans ton coeur. » (Dt 6, 4-6.)
L’amour est mentionné, dans le Coran et la Sunna, aussi bien comme un privilège de Dieu qu’un privilège des êtres qu’il a créés. On y dit que Dieu aime les êtres qui développent les qualités de l’âme et qu’il favorise l’amour des époux. « Un des signes de Dieu est d’avoir créé des couples de vos âmes […], afin que vous y reposiez en paix. Il a mis aussi entre vous l’affection et la miséricorde. » (Coran 30, 21.) De même, « la demeure de l’amour est une distinction élevée, et l’amour est le principe de l’Existence universelle », lit-on dans les nouvelles prophétiques musulmanes.
Dans la Bhagavad-Gîta, texte sacré de l’Inde, le Seigneur Krishna dit à son disciple Arjuna, qui se déclare inapte à pratiquer le yoga et demande de se retirer dans la forêt pour s’y livrer à une méditation solitaire : « De tous les yogis, celui qui, avec une foi totale, vit toujours en moi, m’adorant et me servant avec amour, je le tiens pour le plus grand et le mieux uni à moi . »
De même, les Upanishad enseignent la dévotion fervente basée sur l’amour, appelée le bhakti yoga, qui est considéré comme l’une des trois voies de la délivrance. Dans le Bhagavata Purana, on raconte que Vishnu – Krishna « n’aime que la pure bhakti, tout le reste est superflu (anyad vidambanam)». Un autre récit concerne l’amour que le jeune Krishna inspire aux gopis (jeunes filles qui soignent les troupeaux) et la rasa-lila, soit la danse d’amour entre Krishna et chaque jeune fille.
La dévotion hindoue a influencé le bouddhisme : la doctrine du mahayana, qui apparaît dans la littérature des sutras de la gnose transcendante, enseigne un changement de l’idéal de perfection basé sur l’amour. L’adepte du mahayana désire être un bodhisattva, c’est-à-dire que tout en ayant atteint l’éveil, il choisit de sacrifier son bien-être à celui de l’humanité tout entière, préférant oeuvrer dans le monde plutôt que de se retirer dans le nirvâna. Il ne sera pas un bouddha silencieux, « mais un éveillé qui parle, qui agit et qui vient au secours des malheureux».
En Occident, c’est le maître Jésus, appelé le Christ, qui a livré comme message essentiel de son enseignement public : « Aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés. » (Jn 15, 12.) Car « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux que l’on aime », lit-on dans l’Évangile de saint Jean.
« Si un homme aime Dieu, celui-là est connu de Dieu », nous dit saint Paul dans sa première épître aux Corinthiens (8, 3). Et il ajoute : « Soyez enracinés dans l’amour et fondés sur lui. Ainsi, vous connaîtrez enfin l’amour du Christ qui défie toute connaissance, et vous serez remplis de toute la plénitude de Dieu. » (Éphésiens 3, 14-19.) Ainsi, tous les maîtres spirituels, tels que Moïse, Jésus, Mahomet, Bouddha ou Krishna, ont été des messagers de l’amour. La force de leur message a eu une portée immense sur l’évolution des êtres humains au cours des âges, au point de changer le monde. Et c’est pourquoi les mystiques ont toujours témoigné de la dimension spirituelle et hautement initiatique de l’amour.
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Ce traité sur l’amour présente les témoignages de philosophes et mystiques, tant d’Orient que d’Occident, qui ont puisé leurs révélations à la source universelle de l’amour et ont exprimé tous les aspects de l’amour qu’il est possible de vivre, du plus concret, naturel et humain au plus subtil, spirituel et divin. Il est subdivisé en huit chapitres, qui retracent les appellations de l’amour, son évolution et sa finalité, puis présentent les manifestations de l’amour sur les plans universel, humain, humanitaire et divin de l’existence humaine. Ces textes s’appuient sur les témoignages de mystiques chrétiens, soufis et bouddhistes, tels que Angèle de Foligno, Ibn ‘Arabî, Jean-Yves Leloup, Saadi, Thérèse d’Avila, Graf Dürckheim, le Dalaï-Lama, Mère Teresa, Thich Nhat Hanh et Rûmî, ainsi que de mystiques hindouistes, tel Deepak Chopra, et amérindiens, tels Lat-Kekht dit chef Joseph, John Snow et Swift Deer.
La vision kabbalistique de l’amour, principalement dans le symbolisme de l’Arbre de Vie, y est également présentée. De plus, le lecteur découvrira l’approche mystique proposée par l’Ancien et Mystique Ordre de la Rose-Croix (AMORC) sur l’amour divin et l’amour christique.
Enfin nous avons résumé, en avant-dernier chapitre, les observations psychologiques et les résultats d’études scientifiques sur le pouvoir spirituel de guérison de l’amour.
Quelle est la place de l’amour dans l’avenir de l’humanité ? Notre conclusion pose l’audacieux postulat de l’« amorisation », avancée par Teilhard de Chardin, en résonance avec les fleurs spirituelles du Jardin de roses de Saadi :
Emporte une rose du jardin,
Elle durera quelques jours.
Emporte un pétale de mon Jardin de roses,
Il durera l’éternité…
… comme l’aboutissement inévitable du processus de l’évolution humaine.
Extrait de : Les grandes voies de l’amour de Aline Charest, Diffusion rosicrucienne.